Dans les musées
Le musée de l'École de Nancy
Le musée de l’École de Nancy est l’un des rares musées français dédié à un mouvement artistique : l’Art nouveau. Au cœur du quartier Nancy Thermal, le musée se situe dans l’ancienne propriété du plus important collectionneur de l’École de Nancy, Eugène Corbin. À l’intérieur de la maison, meubles, objets d’art, verreries, céramiques, vitraux, peintures et tissus illustrent la diversité des techniques travaillées par les artistes de l’École de Nancy. Des pièces uniques sont exposées. Elles témoignent de la virtuosité technique de ces artistes, mais également de la diffusion d’objets édités à un grand nombre d’exemplaires.
La collection de verre, une collection de référence
L’École de Nancy est surtout connue pour son travail du verre, qui bénéficie d’un savoir-faire ancien en Lorraine. Le verre est présenté dans les collections permanentes du musée, associé aux meubles et aux objets d’art, à l’exception des pièces d’Émile Gallé qui disposent d’une galerie entièrement dédiée. La collection de verre du musée de l’École de Nancy réunit plus de 900 pièces. Cet ensemble, constitué dès l’origine du musée, témoigne des innovations apportées dans ce domaine par l’École de Nancy.
Le musée abrite plus de 400 œuvres d’Émile Gallé dont un échantillon de sa production choisi par lui, entré dès 1903 dans les collections municipales. Par la suite, des achats et dons ont complété ce fonds, provenant d’importants collectionneurs dont Eugène Corbin (1935), Henry Hirsch (1955) mais également des descendants de l’artiste qui ont été très généreux envers le musée. Cet ensemble permet d’évoquer l’évolution de l’artiste depuis un verre transparent, orné de motifs peints ou dorés vers un verre de plus en plus coloré, jouant sur des effets de matière, des applications et/ou insertions. Grâce à de nouvelles techniques, le maître-verrier associe innovation et recherche artistique puisant dans le répertoire naturaliste. Autour de 1900, Gallé s’inspire de l’ancolie, de l’iris ou de la berce des prés tant pour définir de nouveaux décors que pour proposer des formes inédites. La collection du musée renferme des pièces maîtresses tel le vase Les hommes noirs (Exposition universelle de 1900), la coupe Roses de France (1901) ou Main aux algues et coquillages (1904).
La manufacture Daum va suivre l’exemple d’Émile Gallé et développer ses propres créations, expérimentant d’autres techniques telles la pâte de verre et les adaptant avec justesse et sensibilité à un mode de production industriel. Le fonds Daum du musée comprend plus de 150 pièces, depuis la création d’un département artistique au sein de l’entreprise en 1891 jusqu’aux années 1920. Les pièces exposées privilégient les végétaux comme la gourde coloquinte, le vase Ancolies… Elles témoignent aussi de l’éventail des techniques utilisées par la manufacture : colorations, poudres, applications, martelage, gravure. Le musée conserve également d’autres verriers proches de l’École de Nancy : les frères Muller, Paul Nicolas, Désiré Christian ou encore André Delatte.
Les vitraux, emblèmes de l’Art nouveau
Les artistes de l’École de Nancy veulent renouveler l’ensemble des arts décoratifs : le vitrail n’échappe pas à cette vague de créativité. Il est travaillé dans le cadre de recherches architecturales, particulièrement foisonnantes au début du XXe siècle à Nancy. Si le nom de Gruber est le plus célèbre, d’autres artistes sont présents dans les collections du musée de l’École de Nancy qui conserve environ 150 vitraux datant de la fin du XIXe siècle à la veille de la Seconde Guerre mondiale : du style Art nouveau jusqu’à l’Art déco.
Le vitrail est une barrière entre l’extérieur et l’intérieur. Il absorbe les rayons du soleil et en restitue une partie, une lumière qui n’est plus neutre mais colorée, donnant aux intérieurs une atmosphère souvent appelée « aquarium ». Le vitrail s’adapte également aux architectures qui, parfois, nécessitent l’opacité complète. Elle peut être requise pour masquer un environnement médiocre comme pour la galerie de La Salle de Gruber. Ou donner l’illusion d’un jardin pour le vitrail Les Roses conçu pour l’appartement des Corbin rue Mazagran à Nancy.
Les baies des vérandas, des bow-windows ou des fenêtres donnant sur jardin étaient garnies de vitraux non opaques, ce qui permettait de profiter de la nature environnante. Par exemple, le vitrail Pomme de Pin de Gruber au rez-de-chaussée du musée ou encore celui représentant une corbeille de fleurs par Ventrillon en 1923, pour la porte fenêtre de l’aile des années 1920 de la maison Corbin.
Les innovations techniques participent au rendu décoratif : la superposition de couches de verre, la gravure à l’acide, le verre chenillé, le verre américain inventé par Tiffany, associés à la peinture à la grisaille, permettent d’obtenir de véritables tableaux décoratifs. Si l’iconographie est essentiellement d’inspiration végétale, la figure humaine est aussi présente, notamment avec La lecture d’Henri Bergé. Le vitrail peut être aussi utilisé à des fins publicitaires comme pour le champagne Canard-Duchêne, avec un vitrail exécuté par Joseph Janin.
Luminaires, la modernité Art nouveau
Avec l’apport de l’électricité domestique, les créateurs nancéiens vont imaginer les premiers modèles de luminaires à poser ou à suspendre. Les collections permanentes en présentent plusieurs exemplaires, qui participent à la restitution de l’atmosphère d’une habitation 1900. Les premières pièces ont rejoint les collections avec la donation d’Eugène Corbin en 1935, puis le fonds a été progressivement développé. Le musée conserve une trentaine de ces pièces, dont certaines sont des emblèmes de l’Art nouveau.
Émile Gallé s’intéresse aux lampes à partir de 1902 et va se tourner, à nouveau, vers la nature pour créer des objets totalement inédits. La monture de la lampe aux ombelles s’inspire de la tige et des feuilles de cette plante, alors que les fleurs et les graines décorent la vasque et son support. La suspension Oignon témoigne des ressources trouvées dans les végétaux pour concevoir ces nouveaux objets. La lampe Les Coprins illustre trois champignons à diverses stades de croissance et a donné naissance aux célèbres « lampes champignon » de l’Art nouveau nancéien.
La manufacture Daum va collaborer avec Louis Majorelle dans ce domaine en associant globes en verre et monture en métal. Le flambeau Magnolia en est un parfait exemple. Le support évoque le mouvement dynamique et vertical des tiges, alors que le fin travail de verre gravé et coloré des globes reproduit la carnation des fleurs. La lampe Figuier de barbarie adopte le même principe, associant un travail de métal patiné et de verre coloré pour ce luminaire exceptionnel et unique. Le musée conserve aussi des lampes des frères Muller, en particulier la lampe La nuit plus classique dans sa forme et son décor évocateur du hibou et de la chauve-souris.
La villa Majorelle
Œuvre de l’architecte Henri Sauvage construite vers 1901-1902 pour l’artiste Louis Majorelle, la Villa Majorelle, également propriété de la Ville de Nancy, se trouve à quelques pas du musée de l’Ecole de Nancy. Classée Monument Historique, ouverte au public depuis 1997, elle témoigne toujours, tant dans son architecture extérieure que dans sa décoration intérieure, de la notion d’unité de l’art prônée par les artistes membres de l’École de Nancy.
La Villa Majorelle occupe une place toute particulière dans l’histoire de l’architecture. Première maison entièrement Art nouveau de Nancy, elle témoigne d’une parfaite collaboration entre artistes parisiens et nancéiens. Aux côtés d’Henri Sauvage, on retrouve le nom de Jacques Gruber pour les vitraux.
Les ateliers Majorelle ont collaboré avec la manufacture Daum pour la création de luminaires, pratiquant depuis 1897 la ferronnerie, notamment pour les montures de lampes. Ils ouvrent de nombreux magasins à travers la France.
Dans la cage d’escalier de la Villa Majorelle est accroché un lustre Algues réalisé par Louis Majorelle avec la collaboration de Jacques Gruber et de la Manufacture Daum. Il est assez proche dans sa forme et son décor, du modèle d’origine de la Villa Majorelle.
Le musée des Beaux-Arts de Nancy
La collection Daum du musée des Beaux-Arts de Nancy rassemble plus de 900 pièces de verre. Elle est composée d’objets datant des débuts de la manufacture à Nancy (1878) jusqu’aux créations contemporaines. Cet ensemble exceptionnel constitue aujourd’hui une collection de référence.
Le fonds Daum, dont environ 300 sont exposées, est présenté dans les 600 m2 du sous-sol du musée, autour des vestiges des fortifications de l’imposant bastion d’Haussonville.
La sélection offre un panorama complet de la production de la manufacture lorraine, depuis son origine en 1878 jusqu’aux créations actuelles : des premiers services de table des années 1880, en passant par les productions art nouveau puis art déco, les pièces en cristal des années 50 ou les créations en collaboration avec des artistes comme Dali ou César. Les objets témoignent des recherches et des inventions incessantes et diversifiées de la cristallerie en termes de techniques, de matières, de fonctions, de décors et de formes (pâte de verre, cristal, gravure à la roue ou à l’acide, décor intercalaire...).
La première œuvre de cette collection est entrée au musée des Beaux-Arts en 1905. Il s’agit d’une lampe à pied datée de 1904. Puis l’ensemble a fait l’objet d’enrichissements réguliers. En 1982-1983, le musée a acquis 127 pièces directement auprès de la manufacture, parmi lesquelles le vase Tristan et Iseult. Depuis 1984, de nombreux achats et dons de la famille, de la cristallerie, des Amis du musée - association Emmanuel Héré et de la Société Lorraine des Amis des Arts et des Musées viennent peu à peu compléter cet ensemble.
Après l’extension et la rénovation du musée en 1999, 250 nouvelles pièces, principalement des services de table comme le service Montgolfier, sont venues s’ajouter à la collection. En 2004, 60 pièces, réalisées entre 1893 et 1937, ont été achetées, notamment le Vase René II, des ensembles de flacons à parfum, ainsi qu’une série de vases aux teintes vives réalisés dans les années 1920. Deux dons importants en 2011 et en 2015, composés de services de table mais aussi d’un lot de verres d’essai, témoins des recherches de la manufacture sur la couleur, sont venus enrichir cette collection.